Gestion de la collecte en ‘full-service’ : d’incontestables avantages
22/03/2023 - Partout en Europe diverses agences commerciales de fundraising offrent aux acteurs du secteur non-marchand de gérer en sous-traitance soit l’ensemble (option ‘full service’) soit une partie conséquente de leurs tâches de communication et de collecte de fonds.
En Belgique la société Direct Social Communication (DSC) figure parmi les principaux acteurs présents sur ce créneau, aux côtés de Mindwize, une agence présente dans cinq pays européens, dont les Pays-Bas.
La formule ‘full-service’ permet par exemple au fondateur d’une nouvelle initiative à finalité humanitaire de se concentrer en priorité sur les projets de terrain qu’il affectionne, après s’être libéré de la collecte de fonds dont la gestion est assurée de manière professionnelle par une agence commerciale de fundraising.
Tel est par exemple le choix du docteur Réginald Moreels, ex-Président de MSF et vaillant septuagénaire mobilisé sur les projets de santé de l’asbl UNICHIR dont il est co-fondateur, qui collabore étroitement avec l’agence DSC pour la gestion d'une partie des activités de fundraising.
SOS World, étrange réussite sur base d'une sous-traitance intégrale de la collecte de fonds
Il arrive cependant que la sous-traitance intégrale de la collecte de fonds pose question.
Ainsi deux articles parus mi-février dans le Belang van Limburg et L’Avenir ont-ils tenté de comprendre pourquoi et comment SOS World - une asbl qui n'existe qu'en Belgique, où elle est relativement peu connue - s'est massivement investie il y a quelques semaines dans une importante et coûteuse campagne d'appels aux dons 'Turquie-Syrie'.
Cette enquête fait apparaître que la collecte de SOS World a bénéficié d’une croissance fulgurante depuis sa création en 2014. Alors que l'association ne dispose guère, en dehors d’une boite aux lettres, d’un ancrage significatif dans la vie associative belge, elle aurait recruté 24.000 donateurs en moins de dix ans, grâce aux nombreux mailings orchestrés par l’agence commerciale Direct Social Communication.
Faible degré de transparence
Surpris par l’ampleur de la campagne d’appels aux dons ‘Turquie-Syrie’ financée par SOS World au travers de mailings et d’encartages dans divers quotidiens du Nord du pays, le journaliste du Belang van Limburg découvre que cette asbl de droit belge a été fondée par Thomas Schirrmacher, un théologien et évêque allemand lié à l’Eglise Evangélique, ainsi que par deux membres de sa famille qui résident comme lui en Allemagne.
Le premier siège social de l’association a été établi en 2014 à Bruxelles dans les bureaux de l’agence de fundraising DSC.
Le site de SOS World ne comprend, au moment de l’enquête du Belang van Limburg, nulle information concrète concernant le mode de gouvernance, les rapports d’activités et les comptes annuels de l’association. L’agrément fiscal de SOS World n’a pas été accordé ou n'est pas prolongé, et SOS World n’est pas reconnu par l’AERF ou par la Fondation Donorinfo pour la transparence de ses comptes.
Gebende Hände : une association proche dont certaines pratiques sont critiquées
L’article du Belang van Limburg note qu’un autre membre de la famille Schirrmacher est impliqué dans la gestion de l’association allemande Gebende Hände. Le site allemand Webwiki.de, dont le degré de crédibilité n'a pu être vérifié, s'est fait l’écho de plaintes émanant de donateurs allemands concernant des méthodes de collecte de fonds inappropriées de cette association : utilisation abusive d’adresses personnelles, envoi de mailing accompagnés de gadgets inutiles, etc.
On sait que ces pratiques sont contestées en Allemagne où elles sont encouragées par certaines agences de fundraising. Elles correspondent à des modes de collecte qui ont été également dénoncés à plusieurs reprises dans divers médias belges.
Egalement alertée par l’ampleur de la récente campagne d’encartage ‘SOS Turquie-Syrie’ de SOS World dans nombre de quotidiens francophones, une journaliste de L’Avenir s’est à son tour demandée « qui sont ces collecteurs de fonds qui interviennent au nom d’une cause humanitaire, avec une force de frappe impressionnante malgré leur petite taille ? » (L’Avenir, 24 février)
Elle constate également le peu d’informations publiées sur le site de l’association.
Une asbl ‘boîte aux lettres’, pilotée depuis l'étranger par des administrateurs animés de bonnes intentions
SOS World ne semble guère disposer en Belgique d’un semblant d'équipe locale mobilisée soit au siège social bruxellois de SOS World - qui ne comprend qu’une boite aux lettres - soit ailleurs dans le pays.
La ligne téléphonique de l’association est connectée à un répondeur de l’agence commerciale DSC.
L’asbl serait pour l'essentiel une structure juridique vide, contrôlée à distance par une famille allemande résidant aux environs de Bonn. Il est probable que cette famille aura appris en 2014 qu'une agence de fundraising établie à Bruxelles pourrait lui construire une stratégie de collecte de fonds sur le territoire belge. Neuf ans plus tard nul enracinement significatif de SOS World dans la vie associative belge, en dehors des activités performantes de collecte de fonds gérées par Direct Social Communication (DSC).
Ludo Longin, CEO de l’agence DSC, se veut rassurant quant aux nobles intentions des fondateurs de SOS World, et quant à la bonne affectation des dons reçus par l’association. La recette nette de la collecte serait directement versée en faveur d’initiatives locales identifiées, par exemple en Turquie et en Syrie, par les Eglises Evangéliques allemandes. Cette aide n'aurait aucun lien avec l'activité de Gebende Hände.
Six semaines après le séisme du 6 février le site de SOS World ne publiait aucune information concernant l'assistance concrète qu'elle aurait déjà déployée en Turquie ou en Syrie.
La direction de DSC indiquait récemment que l'association s'est engagée à améliorer la qualité de sa communication aux donateurs. Ceux-ci seront certainement heureux d'enfin en savoir plus concernant le pourcentage des dons collectés au cours des années précédentes que SOS World affecte directement à ses projets humanitaires de terrain.
Levée de fonds : des méthodes de collecte performantes, bien que susceptibles d’irriter les donateurs
Nulle autre ONG de solidarité Nord-Sud active en Belgique ne semble avoir bénéficié depuis 2014 d’une croissance de la collecte aussi performante que celle de SOS World.
La plupart de ces ONG hésiteraient cependant à recourir aux méthodes de collecte efficaces, autant que contestées, pratiquées par cette organisation :
- prospections ciblées sur des fichiers de donateurs loués à d’autres organisations (quid de la réglementation RGPD ?),
- fréquence élevé des mailings,
- messages de tonalité misérabiliste,
- envoi de courriers accompagnés de gadgets inutiles offerts au titre de cadeaux (visuel ci-contre).
D'autant que la pertinence d'une campagne intégralement gérée pas un sous-traitant commercial doit également s'évaluer sur base du pourcentage des frais de collecte. Une information essentielle que nombre d'organisations préfèrent ne pas communiquer.
Appels en urgence de nature opportuniste, car conçus dans une double finalité humanitaire et commerciale
L’instauration de la réglementation RGPD a quasiment aboli l'échange de fichiers de donateurs dans divers pays, tel le Royaume-Uni et les Pays-Bas. Cette pratique est par ailleurs rejetée par une grande majorité d’associations, notamment en Belgique.
Certaines agences commerciales de fundraising estiment cependant que le RGPD ne leur interdit pas de conserver une mainmise sur d’importants fichiers communs d’adresses de donateurs, même si ces derniers n'ont pas explicitement autorisé ('opt-in') la cession de leurs données personnelles à des tiers.
Elles se rémunèrent dès lors, comme d'autres list-brokers, en louant ces fichiers dans le cadre de campagnes de prospection.
D'aucuns se sont étonnés, lors la récente crise humanitaire 'Turquie-Syrie', de ce que plusieurs associations peu connues pour leur expertise en situation d'urgence humanitaire, et dont la collecte de fonds est gérée par la même agence commerciale de fundraising, ont immédiatement exploité l’opportunité de cette crise médiatisée pour procéder à d'importantes campagnes d’appels aux dons.
Il est vrai que pareille opération peut s’avérer triplement bénéfique, certainement au profit des victimes du désastre qui bénéficient ainsi d’un soutien renforcé, mais également pour l’association qui recrute de nouveaux sympathisants ainsi que pour l’agence commerciale qui enrichit ainsi discrètement et sans surcoût son précieux fichier commun de donateurs.
On ne manquera pas de constater que dans pareille opération finalité humanitaire et intérêts commerciaux s’en trouvent curieusement entremêlés.
Notons par ailleurs que certains donateurs nouvellement recrutés s'étonneront de recevoir par la suite des appels aux dons provenant pour partie d'associations auxquelles leurs coordonnées personnelles auront été discrètement transmises.
RGPD : à quand une meilleure prise en compte des intérêts légitimes des donateurs ?
Une majorité de donateurs apprécierait probablement que la Belgique adopte à son tour un dispositif comparable aux mesures en vigueur aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, où la cession de données personnelles nécessite l'accord préalable ('opt-in') des personnes concernées.
L’approbation par l'APD (Autorité de Protection des Données) d’un Code de Conduite RGPD spécifique au secteur de la collecte – une mesure préconisée depuis plusieurs années par l’AERF - pourrait y contribuer.
Bientôt d'autres organisations caritatives implantées à l'aide d'agences de fundraising ?
On n'a guère connu, en dehors de asbl SOS World et de Noma, d'autres acteurs de la collecte qui aient été été implantés récemment sur le territoire belge grâce au soutien décisif d'une agence locale de fundraising.
L'asbl Noma a été fondée comme SOS World en 2014, à l'initiative de la fondatrice de l'ONG allemande Hilfsaktion Noma e.V. Ce partenaire allemand figurait en 2016 dans la liste des organisations caritatives allemandes qui contrevenaient, selon la Deutsche Zentralinstitut für soziale Fragen (DZI), à d'importantes règles en matière de pratiques commerciales (visuel ci-dessus).
Difficile de prévoir dans quelle mesure d'autres associations pourraient à leur tour s'implanter en Belgique grâce au soutien d'une agence de fundraising.
On notera toutefois que par exemple le réseau international d'agences Mindwize valorise un peu partout en Europe, et notamment en Suède (confer visuel ci-contre 'Insamling i Belgien'), la capacité de ses équipes à implanter une association dans un pays européen où cette société dispose de bureaux régionaux (lien).
Le professionalisme des agences de fundraising est, à juste titre, fort apprécié par le secteur associatif.
Leur impact positif sur l'évolution globale du secteur de la générosité est largement reconnu.
Certaines pratiques posent toutefois question, notamment lorsque ces sociétés favorisent l'implantation artificielle - faute d'ancrage réel dans la vie associative belge - de nouveaux acteurs de la collecte importés depuis l'étranger.
-> Récapitulatif des articles relatifs aux risques de dérives en matière de méthodes de collecte de fonds :
'Direct Social Communications: des techniques de fundraising souvent critiquées'
Sources
site SOS World
- site Direct Social Communication
- Gebende Hände
- Het Belang van Limburg (18-02-2023) – ‘De Duitse wortels achter de nauwelijks bekende vzw SOS World’
- L’Avenir (24/02/2023) ‘Collecte de fonds : petits et fiables?
- Gebende Hände in Webwiki – ‘Erfahrungen und Bewertungen zu Gebende Hände’ (lien)
-> Autres articles consacrés aux pratiques commerciales de l'agence Direct Social Communications (lien)
-> Autres articles consacrés à la thématique 'Ethique et transparence' (lien)
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Mise à jour en date du 16/03/2023
Le tremblement de terre du lundi 6 février dernier a mobilisé dès les premiers jours nombre de communautés locales d'origine turque et syrienne établies en Belgique. D'Anvers au Limbourg en passant par Bruxelles et Liège, ces initiatives ont encadré d'importantes opérations locales de collecte de biens de première nécessité, ainsi que de nombreux appels aux dons.
Citons à titre d'exemple les 235 tonnes de matériel et d'aide alimentaire acheminés au départ de la mosquée Selimye de Berchem (Anvers).
Mentionnons également la campagne de solidarité orchestrée par l'ONG belge Karama Solidarity, qui cible plus particulièrement l'importante communauté des personnes de onfession musulmane.
Fonctionnement
Le Consortium 12-12 associe huit ONG dont les équipes sont susceptibles d’intervenir rapidement lors de crises humanitaires majeures, et qui choisissent de mobiliser la générosité des Belges au travers d'une campagne commune d'appel aux dons.
Leur compétence en qualité d'ONG urgentistes est reconnue par diverses instances belges autant qu'internationales du fait de leur capacité avérée à intervenir rapidement et efficacement sur le terrain.
Ces interventions se réalisent au moyen soit de leurs propres équipes soit de partenaires locaux identifiés par le réseau international dont ces ONG belges sont membres : coordinations internationales Oxfam Solidarité, Caritas Internationalis, etc.
Membres actuels du Consortium belge :
Le Consortium 12-12 fait partie du réseau Emergency Appeals Alliance qui regroupe l'ensemble des coordinations nationales d'ONG établies dans d'autres pays de l'hémisphère Nord où elles coordonnent de semblables campagnes collectives d'appel aux dons.
Belgique : étonnant retard à l'allumage
Tenant compte des prévisions très pessimistes concernant le tremblement de terre survenu au coeur de la nuit du 6 février, les coordinations nationales européennes associées au réseau Emergency Appeals Alliance avaient toutes, à l'exception du Consortium belge, activé leur campagne de mobilisation nationale au plus tard le jeudi 9 février, et souvent plus tôt.
En Belgique, déçus par l'absence de perspective de campagne nationale de solidarité, certains relais politiques liés notamment aux communautés d'origine étrangère (Turquie, Syrie) ont interpelé le Parlement flamand : comment justifier l'absence de campagne nationale d'appel aux dons alors qu'un an plus tôt l'initiative commune 'Solidarité Ukraine' du Consortium belge avait permis de collecter rapidement plus de 30 millions € ?
Bilan de la collecte (15 mars) : 13,5 millions €
Le lancement imminent d'une campagne belge 'Turquie-Syrie 12-12' ne fut finalement annoncé dans les médias que le dimanche 12 février.
Or l'action commune Giro 555 des ONG néerlandaise avait déjà collecté 16 millions € la veille, et la campagne britannique publierait dès lundi 13 février un résultat provisoire de 75 millions € de dons.
Au final le bilan de la campagne du Consortium 12-12 s'élevait le 15 mars dernier à 13,5 millions €.
Ce montant a bénéficié du produit de la Journée de solidarité du lundi 5 mars, qui fut relayée par différents médias dont RTBf, RTL, Radio 1, Radio2, Radio2, Klara, Studio Brussel, MNM, Qmusic, Joe, Willy, NRJ, Nostalgie en Nostalgie+.
Plusieurs artistes néerlandophones ont produit à cette occasion un clip vidéo 'People help the People' dont la diffusion s'est accompagnée d'appels aux dons.
La Journée de Solidarité des chaines radio/TV, qui ne s'est pas prolongée cette fois par une émission spéciale en télévision, a permis de récolter 1,8 million d’euros.
On soulignera que les médias radios et TV des deux régimes linguistiques s'étaient, pour la première fois depuis plus de dix ans, accordés sur le principe d'une date commune pour la journée de mobilisation nationale.
Impact de la générosité des Belges sur le terrain : premier bilan du Consortium
Un montant de 13 millions d’euros a déjà été transféré depuis le compte 12-12 du Consortium aux organisations membres, sur la base d'une clé de répartition pré-établie.
La plateforme a publié le 13 mars dernier un premier bilan concernant l'implication concrète de ses organisations membres et de leurs partenaires locaux en Turquie et en Syrie :
Médecins sans Frontières (MSF) a choisi depuis longtemps de ne plus faire partie du Consortium 12-12.
Le réseau international MSF comprend un Centre Opérationnel établi à Bruxelles (OCB). Le bilan financier de cette structure internationale établie en Belgique fait état d'un budget annuel d'environ 37 millions € dédiés aux interventions en situation d'urgence, et de près de 250 millions € investis dans d'autres réalisations de terrain (comptes 2021).
MSF-Belgique est à ce titre le principal opérateur non-gouvernemental belge en matière d'interventions liées à des conflits ou des désastres naturels.
Les interventions en situation d'urgence sont couvertes pour partie par un Fonds d’Urgence qui est alimenté par les dons perçus à l'occasion de crises humanitaires exceptionnelles et fortement médiatisées, telle l'actuelle Urgence 'Turquie-Syrie'.
Ce dispositif vise à éviter que le montant les aides octroyées par l'ONG dépendent trop directement du degré de médiatisation de chaque crise humanitaire. L’ONG informe dès lors chaque donateur, notamment dans le cadre de l'actuelle Urgence 'Turquie-Syrie', de ce que sa contribution pourrait le cas échéant être affectée au financement d’interventions en faveur des victimes d'autres « crises oubliées ».
La plupart des coordinations nationales d’ONG affiliées au réseau international Emergency Appeals Alliance ont lancé leur campagne collective d'appel à la générosité endéans les 48 heures après le double tremblement de terre du lundi 6 février 2023.
Citons par exemple :
Pays-Bas : 88,9 millions €
Le résultat provisoire de la campagne néerlandaise Giro 555 s'élevait le 15 mars dernier à 88,9 millions €.
Plusieurs médias néerlandophones se sont à étonnés de ce que le niveau de générosité des Néerlandais se soit une fois encore révélé incomparablement supérieur au résultat atteint par le Consortium belge.
Cette différence notable découle en partie d'une tradition de générosité plus développée dans divers pays nordiques, de tradition protestante. Elle s'explique également du fait d'autres facteurs :
- comme indiqué plus haut, l'appel à la solidarité Giro-555 a été lancé bien plus tôt que la campagne belge,
- plusieurs grandes ONG néerlandaises proposent d'emblée à leurs donateurs de soutenir la campagne commune Giro-555. Les ONG belges préfèrent solliciter massivement leur réseau de donateurs avant de soutenir dans un deuxième temps une campagne nationale collective.
- une soirée télévisée spéciale, entièrement dédiée à cette crise humanitaire majeure, a permis de lever 22 millions € auprès des téléspectateurs néerlandais.
Royaume-Uni : 114 millions €
Le consortium britannique DEC (Disaster Emergency Committee) avait déjà collecté 75 millions € en six jours, jusqu'au lundi 13 février.
Un montant provisoire de 114 millions € a été enregristré vers la mi-mars.
France
Deux campagnes nationales coexistent en France, à l'initiative d'Alliance Urgence qui regroupe diverses ONG urgentistes, ainsi que de la Fondation de France qui s'est associé avec les chaînes de France Télévision.
Le montant collecté à l'occasion de la soirée spéciale retransmise en direct par France 2 depuis l'Olympia n'est pas encore connu.
Les structures françaises ne sont pas affiliées au réseau Emergency Appeals Alliance.
Consortium 12-12
Le résultat encourageant de la campagne 'Turquie-Syrie' s'ajoute au bilan exceptionnel enregistré un an plus tôt lors de l'opération 'Ukraine 12-12'.
Cette double réussite confirme combien la démarche collective proposée par le Consortium 12-12 répond à une réelle attente des donateurs belges, ainsi que des nombreux médias qui sont prêts à s'y associer.
Encore faut-il que les ONG membres de la plateforme ne s'égarent pas, comme ce fut le cas début février, dans des tergiversations funestes qui génèrent une perte de temps et une diminution du potentiel de dons collectés en faveur des populations sinistrées.
Ailleurs en Europe
Précisons que l'extrême générosité des européens à l'égard des victimes de la guerre en Ukraine s'est également manifestée dans plusieurs pays voisins.
Ainsi la campagne néerlandaise Giro 555 a-t-elle recueilli 188 millions €, tandis que le montant collecté au Royaume-Uni figure en deuxième position parmi les 75 campagnes nationales organisées depuis la création initiale du Disaster Emergency Committee (DEC).
Une intéressante contribution de la publication en ligne Civil Society analyse le contexte très particulier qui a favorisé le remarquable élan de générosité des britanniques dès le début de la guerre en Ukraine.
-> Lire Civil Society (08-02-2023) - 'Sam Wait: Why has DEC’s Ukraine appeal been so successful?'
L'article se fait notamment l'écho d'un diagnostic réaliste avancé par Jess Crombie, consultant engagé dans le secteur humanitaire : “To a UK audience, you’re removing largely a racial barrier as Ukrainian people are predominantly white. You’re removing a European barrier, a geographical barrier, you’re removing a socio-economic barrier in some way, though not entirely and you’re removing a kind of normative lifestyle barrier."
En d'autres mots : "When people find it easier to relate to those affected by a crisis, they therefore believe it does not deserve to happen to people “like them.”
Autres articles récents concernant la thématique URGENCES :
- Consortium pour les situations d’urgence - Campagne 'Ukraine 12-12' (lien)
- Urgences humanitaires : les campagnes collectives d’appel à la solidarité (lien)
Sources
- Radio 1 - 'Nederland zamelde al meer geld in dan België voor slachtoffers aardbeving' (link)
- site Consortium 12-12
- site Karama Solidarity
- site Emergency Appeals Alliance
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17/03/2023 - De nationalité française mais résidant à Montréal, Charlène Petit anime depuis 2019 le podcast francophone FILantropio.
Intervenant dans le cadre du Colloque 2022 de France Générosités (replay), elle y partagea sa vision concernant les nouvelles formes de générosités, et fit notamment référence à la récente expérience Better, lancée en Belgique à l’initiative de la Fondation Gingo.
Charlène Petit considère que le geste de don n’est pas en voie de désengagement, mais bien de transformation.
Au lieu de donner par habitude ou par loyauté, les jeunes générations souhaiteraient davantage choisir à qui donner. La relation serait désormais un enjeu central pour les donateurs de la génération Z, qui aiment vivre en 'tribus' et apprécient de pouvoir cultiver un sentiment d'appartenance et de partage.
Charlène Petit rappelle à l'attention des organisations de solidarité qu’une audience capter de manière articielle peut facilement les oublier. A l'inverse, une communauté de sympathisants qui ont librement choisi les causes qui leur sont proches sera probablement plus fidèle. La stratégie de communication des organisations de solidarité gagnerait donc à passer de l’actuelle logique d'audience à une logique de communauté.
Elle souligne que les nouveaux canaux de communication digitale permettent précisément de tisser des liens plus en profondeur, et de proposer des contacts plus bidirectionnels (moins ‘top down’) entre les parties prenantes.
On sait que cette analyse et ces recommandations sont déjà prises en compte par nombre d'organisations de solidarité qui veillent à encourager diverses formes d'engagement plus personnalisés : pétitions, participation à de joyeux événements sportifs solidaires, parrainage de projets, etc.
A l'inverse les principaux et puissants canaux traditionnels de sollicitation, tel le direct mail ou la collecte de rue ('street fundraising') ne prévoient pas encore de proposer aux donateurs de choisir 'à qui donner'.
La présentation de Charlène Petit faisait référence à l'expérience novatrice lancée depuis un an en Belgique à l'initiative de l'asbl Better.
Comme indiqué sur le site de cette association, Better propose aux donateurs de souscrire un abonnement solidaire qui leur permet, chaque mois, de découvrir et de soutenir une association qui répond à leurs préoccupations.
L'asbl sélectionne sur base de critères exigeants une série d'associations qui répondent aux préoccupations des donateurs. Chaque contributeur qui souscrit à l'offre d'abonnement solidaire proposé par Better se voit présenter, le premier dimanche du mois, une vidéo de deux minutes concernant l'association qui a reçu l’intégralité de ses dons mensuels. À la fin de la vidéo chaque adhérent est libre d'approuver ou de désapprouver le choix de Better.
Les dons transitent par un Fonds spécifique logé au sein de la Fondation Roi Baudouin. Ils sont déductibles à hauteur de 45% dès 40 € par an. Ces contributions sont intégralement versées aux organisations bénéficiaires, grâce au mécénat du groupe Degroof Petercam qui prend ces coûts en charge, de même que les frais de fonctionnement de la Fondation Gingo.
Organisations bénéficiaires
Il est prévu qu'à terme les associations sélectionnées couvrent une large palette de secteurs : recherche, soins de santé, Terre, pauvreté, handicap, emploi, seniors, Art & Culture, cancer, Girl Power, jeunesse, réfugiés, discrimination, sport, Aide Internationale, animaux, santé mentale, éducation.
Une quinzaine d'organisations bénéficiaires sont dès à présent mentionnées sur le site : BeCode, Debateville, Doucheflux, Goods to Give, Graine de vie, Le petit vélo jaune, L'Ilôt, River Cleanup, Nojavel!, Tada, Team4Job, SheDidit, Singa.
L'équipe dispose également d'une liste complémentaire d'associations qu'elle recommande aux abonnés désireux de soutenir d'autres causes spécifiques.
Priorité aux philanthropes de demain : jeunes actifs, 25-45 ans
Pour Sylvia Steisel, coordinatrice de la précédente plateforme de crowdfunding GINGO, Better entend apporter à la philanthropie les atouts propres aux startups : activation d'un mode de transaction simple et automatisé, une communication attrayante ainsi que des métriques performantes qui produisent des statistiques utiles au secteur.
Selon Marie Logé, co-fondatrice de Better aux côtés de Thomas Carton de Wiart, cette nouvelle opportunité de don par voie digitale a surtout vocation à intéresser la cible des jeunes actifs (25-45 ans).
Le plan marketing du projet repose dès lors principalement sur l'activation des divers canaux de communication digitale.
Si l'offre actuelle de causes à soutenir intéresse principalement un public bruxellois, l'initiative Better ambitionne de pouvoir s'étendre progressivement d'autres villes ou régions.
Bilan provisoire
Les fondateurs ambitionnaient en juillet 2022 de mobiliser pas moins de cinq mille souscripteurs sur les douze premiers mois.
Les résultats apparaissent plus modestes : quelque 300 donateurs étaient enregistrés début mars en qualité d'abonnés solidaires, pour un montant de 3.000 € de dons mensuels.
Il est prévu que les associations bénéficiaires couvrent une variété de secteurs : recherche, soins de santé, Terre, pauvreté, handicap, emploi, seniors, Art & Culture, cancer, Girl Power, jeunesse, réfugiés, discrimination, sport, Aide Internationale, animaux, santé mentale, éducation.
La liste actuelle des organisations présentées sur le site Better comprend BeCode, Debateville, Doucheflux, Goods to Give, Graine de vie, Le petit vélo jaune, L'Ilôt, River Cleanup, Nojavel!, Tada, Team4Job, SheDidit, Singa.
L'équipe dispose par ailleurs d'une liste complémentaire d'organisations qu'elle recommande aux abonnés désireux de soutenir d'autres causes spécifiques.
Oser investir en innovation tout en respectant à terme le ratio 'frais de collecte'
La coordination de Better est assurée par les deux co-fondateurs du projet.
Les frais de démarrage et de fonctionnement du projet sont intégralement supportés par le mécénat du groupe Degroof-Petercam (Fondation Gingo), et ne sont donc pas soustraits des montants collectés.
La viabilité de cette initiative nécessitera notamment de relever le défi d'une croissance rapide du nombre d'abonnés.
On suppose qu'à terme le ratio coût/efficacité de la plateforme ambitionne de respecter à terme le ratio de 30% de frais de collecte de fonds qu'il est coutume d'associer aux levées de fonds associés à l'octroi d'une attestation fiscale.
Peut-on imaginer qu'à l'avenir cette formule originale de mobilisation de donateurs en faveur de diverses causes qu'ils restent libres de choisir trouve sa place aux côtés de l'actuel mécanisme de recrutement, notamment par voie de mailings ou de street fundraising, qui confronte le donateur à une multiplicité d'appels aux dons concurrents ?
Sources
- Charlène Petit
. Filantropio (lien)
. France Générosités (13-12-2023) - 'Le don pour les nouvelles générations : Interview de Charlène Petit' (lien)
. Table-Ronde clôturant le Colloque 2022 de France Générosités 'Où sont les donateurs français ? Constats et perspectives.' (replay)
- Better
. Site Better (lien)
. Degroof-Petercam - 'Gingo devient Better : la philanthropie digitale pour tous' (lien)
. Bloovi - 'Start-up maakt met digitaal abonnement steun voor goede doelen toegankelijker' (lien)
. LN 24 - 'Success Stories' - 'Interview de Marie Logé, co-fondatrice de Better.app' (lien)
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05/10/2022 - GAIA (Groupe d'Action dans l'Intérêt des Animaux asbl) se présente comme l'association de défense des animaux la plus influente et une des plus connues en Belgique.
Forte de quelque 80.000 sympathisants et donateurs, elle agit en particulier en faveur des animaux exploités pour l'élevage, la fourrure, les expérimentations, de même qu'en faveur des animaux de compagnie ou qui sont parqués dans des parcs animaliers.
Muni d’une licence en Sciences de la Population et du Développement (ULB, 2013-2014), David Nielsen a choisi de faire carrière dans le secteur non-marchand. Ses premiers engagements l’ont amené à rejoindre successivement les Iles de Paix et SOS Villages d’Enfants avant de reprendre depuis avril 2022 la coordination de la collecte de fonds chez GAIA.
Le partage de bonnes pratiques ne pouvant que profiter à la communauté des fundraisers, David a accepté de nous livrer un court témoignage concernant l’expérience de cette association en matière de télémarketing.
Les campagnes de télémarketing dans lesquelles GAIA s’est investi au cours des dernières années ont toujours privilégié une finalité d’up-grading, c’est-à-dire de promotion de l’offre de domiciliation adressée aux sympathisants mobilisés jusqu’alors au travers de dons ponctuels.
L’organisation collabore à cet effet avec les agences Mindwize et Martine Constant Consulting Group, qui prennent respectivement en charge les contacts en Flandre et en Belgique francophone.
Chaque campagne concerne jusqu’à 4.000 contacts, et nécessite un temps de préparation assez conséquent.
L’offre de domiciliation cible principalement les donateurs dont les contributions ont totalisé au minimum 80 € sur les deux dernières années.
La mise à jour du fichier des donateurs ciblés nécessite de procéder à enrichissement au niveau des coordonnées téléphoniques. Cette opération nécessite le recours à un fournisseur extérieur, tel Willy Braillard.
Dans le cas de GAIA l’enquête qualitative que l’organisation adresse tous les deux ans à ses donateurs par voie de mailing permet précisément de collecter les coordonnées téléphoniques de nombreux sympathisants. D’autres infos utiles sont enregistrées à cette occasion, tel les centres d’intérêt spécifiques de certains donateurs.
Concernant le script du dialogue téléphonique, qui se définit en étroite concertation avec l’agence, David est conscient de ce que les membres de l’équipe de télé-contacts en adaptent souvent le déroulement selon leur propre sensibilité.
Les indicateurs de résultats que l’agence transmet chaque semaine à David constituent un outil d’évaluation particulièrement précieux. Il recommande toutefois de ne pas s'égarer dans une analyse trop minutieuse des moindres variations hebdomadaires.
Tout investissement en télémarketing ne se justifie que si le total des contributions mensuelles nouvellement acquises s’avère significativement supérieur aux montants perçus précédemment au travers de dons ponctuels.
Il y a bien évidemment un seuil minimal de rentabilité à respecter. On considèrera par exemple que la campagne est réussie si le niveau de recettes annuelles assurées par les nouvelles domiciliations dépasse de 50% le montant global des dons ponctuels collectés précédemment auprès de la même cible.
Divers facteurs influencent le degré de réussite de l’opération, tel le pourcentage de contacts utiles qui se situe souvent chez GAIA aux alentours de 50%. L’association constate que son offre de domiciliation séduit environ 15% des contacts effectifs sur base d’une domiciliation mensuelle de minimum 5 euro.
Nul n’est cependant à l’abri d’un éventuel contre-temps, découlant par exemple du choix initial de l’échantillon de donateurs ciblés ou de l’efficacité momentanément moins optimale de l’un ou l’autre membre de l’équipe de télémarketing.
David estime qu’un taux d’adhésion proche des 10% devrait inciter l’association à interrompre l’opération. Il est également conscient de ce que le recours au canal ‘télémarketing’ peut susciter un sentiment d’irritation auprès de quelques donateurs.
Et d’ajouter que, si l’efficacité du canal télémarketing s’avère souvent incontestable, les résultats obtenus n’atteignent évidemment pas toujours le niveau de performance suggéré dans les prévisions de certaines agences.
GAIA bénéficie d’une progression régulière des recettes issues de la générosité publique.
L’association compte un pourcentage important de personnes âgées parmi ses adhérents. Elle bénéficie, bien comme bien d’autres organisations dédiées à la cause animale, d’un apport important de recettes issues des legs.
Le direct mail occupe dès lors toujours une place centrale dans le dispositif de collecte, au contraire d'autres organisations dont la thématique permet de mobiliser un public plus jeune, notamment via le canal du street fundraising.
Au chapitre des projets à venir, David mentionne l’implémentation prochaine de la nouvelle version du CRM iRaiser. Ce nouveau support de gestion des contacts facilitera les opérations de segmentation du fichiers ‘donateurs’, ainsi que l’exportation de ces données vers d’autres canaux de communication, tel Mailchimp.
De nouvelles opportunités pourront ainsi être exploitées, notamment en fundraising digital.
Pour plus d'infos
- GAIA
- Martine Constant Consulting Group
- Mindwize
- iRaiser Benelux
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Cette situation fragilise plus particulièrement les organisations qui bénéficient de subsides ponctuels, qui ne peuvent évidemment être indexées en fonction d'éventuelles hausses des coûts.
La Fédération des maisons d’accueil et des services d’aide aux sans-abri (AMA) constate que le secteur des sans-abri a été 'oublié' par le tarif social accordé par le gouvernement fédéral. L'AMA demande depuis plusieurs mois que les centres d'hébergement puissent bénéficier du tarif social pour le gaz et l'électricité.
Au contraire de ce qui se pratique par exemple au Royaume-Uni (voir ci-dessous), on observe qu'en Belgique les organisations du secteur non-marchand n'ont pas l'habitude de se coaliser au niveau national dans le cadre de revendications qui concernent leur gestion quotidienne.
Le lancement il y a quelques mois de la Coalition Impact vise précisément à encourager la concertation entre organisations qui ressentent la nécessité d'interpeler ensemble les autorités fédérales.
Diverses enquêtes font état d'un nombre particulièrement élevé d'organisations caritatives britanniques qui font face à une détérioration exceptionnelle de leur situation financière.
-> EFA - European Fundraising Association (1-12-2022) - 'Cost of living sees more than half of UK charities worried about survival' (lien)
-> Third Sector (30/01/2023) - 'Wave of charity closures as cost-of-living crisis bites' (lien)
Au contraire de la situation belge, l'important réseau d'associations britanniques s'est doté depuis longtemps de puissantes plateformes nationales, tel le NCVO et ACEVO, qui se chargent de relayer leurs revendications communes auprès du gouvernement et du Parlement britannique.
Ces têtes de réseaux n'ont pas manqué d'interpeler les autorités suite à la récente détérioration de la situation financière de nombreuses charities.
Lire :
- NCVO - 'Call for a long-term solution to the energy crisis' (lien)
- ACEVO (10-01-2022) - 'Energy Bill Discount Scheme update' (lien)
- UK Fundraising (10-01-2023) - 'New Energy Bill Discount Scheme lacks sufficient support for charities, sector leaders warn' (lien)
La plateforme CAF (Charities Aid Foundation) s'implique par ailleurs plus directement dans le conseil aux organisations confrontées à d'importants déficits :
-> Charity Hub 'Cost of Living' - 'Helping you continue to support your community through the cost-of-living crisis' (lien)
Sources
- La Libre Belgique (18/01/2022) - 'Les associations qui aident les sans-abri à leur tour dans la dèche'
- Vakblad Fondsenwerving (22-12-2022) - 'Helft Britse non-profits bang om te vallen door kostencrisis in het Verenigd Koninkrijk' (lien)
- Civil Society (06-01-2023) - 'Regulator offers guidance to trustees of charities hit by cost-of-living crisis' (lien)
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