En Belgique
19/11/2021 - On estime en Belgique à environ 150.000 le nombre de nouveaux donateurs recrutés en 2019 dans le cadre de diverses campagnes de street fundraising (collectes sur la voie publique ou en porte-à-porte).
Ces campagnes sont organisées soit en sous-traitance au travers d'agences commerciales (Activate, Direct Result, Pepperminds, ONG Conseil) soit par certaines organisations, tel Greenpeace ou MSF, qui en assurent la coordination en interne ('in-house').
Appellations diverses!
On notera au passage que ces campagnes de mobilisation de donateurs par souscription d'une domiciliation à l'occasion d'un contact direct sur la voie publique sont désignées sous des appelations diverses selon les pays: 'direct dialogue' (Belgique), face to face (Pays-Bas), street fundraising (U.K.), collecte de rue (France).
Risque de détérioration des campagnes 'face to face' aux Pays-Bas ?
Le réseau en ligne WoW réunit plusieurs dizaines de fundraisers néerlandais engagés dans des activités d’échange en ligne d’information et de compétences entre membres.
Soucieux d’éviter que les campagnes néerlandaises de face-to-face aient pour effet de détériorer la relation de confiance entre les donateurs et le secteur de la collecte, un groupe de travail composé de membres du réseau WoW a produit début novembre un intéressant dossier consacré à cette thématique, publié sous le titre ‘Adviesnotitie Duurzame Relaties via Face to Face Fondsenwerving’.
Les constats et propositions de ce rapport ne manqueront pas d'intéresser la trentaine d'organisations belges engagées dans des opérations similaires, bien que le street-fundraising ait évolué de manière assez différente dans ces deux pays.
Déséquilibre entre offre et demande, hausse des coûts
Les auteurs constatent que la demande des organisations caritatives néerlandaises désireuses d’intensifier le recrutement de donateurs sur la voie publique excède à présent la disponibilité en recruteurs de rue ('wervers').
Ce déséquilibre entre offre et demande s’est traduit par une hausse du coût des campagnes de prospection qui s’avère nettement supérieure à celle de l’inflation. S'il est vrai que les années Covid ont entrainé une plus grande disponibilité de recruteurs, cette évolution ne risque pas de provoquer une diminution des coûts.
Davantage de démarchage sur la voie publique du fait des récentes restrictions en matière de télémarketing
Les auteurs sont d’avis que les nouvelles restrictions en matière de télémarketing, qui sont entrées en vigueur à partir du 1er juillet (lien), amèneront d’importantes d’entreprises - principaux opérateurs en téléphonie, etc. - ainsi que davantage d’organisations caritatives à renforcer leurs campagnes de démarchage sur la voie publique.
Confiance des donateurs
Ces difficultés s’inscrivent dans un contexte peu satisfaisant au niveau du degré de confiance des donateurs vis-à-vis du monde associatif.
La dernière édition du Donateurspanel (septembre 2021) fait état d’un léger renforcement de ce niveau de confiance, mais un recul significatif avait été enregistré durant la période Covid.
Les recruteurs, 'travailleurs précaires' ?
Le rapport néerlandais évoque également le fait que que les recruteurs les plus performants sont tentés de s’affranchir des agences commerciales, préférant rejoindre des réseaux d’indépendants qui travaillent en direct pour le compte de diverses associations.
Ces travailleurs n'ont en conséquence accès qu'à une couverture sociale relativement précaire.
Il n’est pas exclu que le gouvernement néerlandais estime devoir prendre des dispositions visant à mieux garantir les droits de ces recruteurs indépendants.
Moins de sous-traitance commerciale, davantage d’équipes ‘in-house’ ?
Les campagnes ‘face-to-face’ (prospection sur la voie publique ou en porte-à-porte) se sont presqu’exclusivement développées aux Pays-Bas à l’initiative d’agences commerciales.
Plusieurs d’entre elles, tel Pepperminds ou Direct Result, ont étendu ultérieurement leurs services en Belgique.
Les auteurs du rapport constatent qu’un nombre croissant d’organisations caritatives néerlandaises envisagent de privilégier désormais l’alternative ‘in-house’, c’est-à-dire la gestion en interne des équipes de recruteurs.
On sait que cette alternative, dont il est généralement admis qu’elle permet de diminuer sensiblement les frais de collecte de fonds, est davantage privilégiée dans les pays du Nord de l'Europe.
Adviesstuk ‘Face to Face Fondsenwerving’: recommandations concrètes
Le rapport du groupe de travail WoW (Werkgroep F2F Fondsenwerving) a produit au départ de ces constats un document d'une vingtaine de pages (lien) qui détaille une série de propositions concrètes.
Ces recommandations entendent compléter le dispositif néerlandais d'auto-régulation mis en place par la plateforme sectorielle DDDN (Direct Dialogue Donateurwervers Nederland): Code DDDN 'Verantwoord en veilig langs de deuren' (lien)
Rappelons qu'en Belgique un mécanisme d’auto-régulation des campagnes de collecte de rue (street fundraising et door-to-door) a été défini par les organisations membres de l’AERF, en concertation avec les agences commerciales concernées. Pour plus d’infos : AERF - ‘Charte du Dialogue Direct’ (lien).
En France c'est dans le cadre de France Générosités qu'une Coordination Nationale du Face à Face (CNFF) assure l'auto-régulation des activités relevant de la collecte de rue (lien).
Témoignage de Cordaid : préservons la qualité des opérations 'face to face'
Notons par ailleurs que les motifs d'inquiétude pointés dans le dossier du groupe de travail Face2Face Fondsenwerving sont également évoqués par Hanneke Warring, senior fundraiser de l'organisation Cordaid, qui témoignait dernièrement à ce sujet dans le mensuel néerlandais Vakblad Fondsenwerving.
Elle reconnait que son organisation se sent totalement dépendante des possibilités de collaboration avec les agences commerciales de street fundraising, et que sur le terrain certains recruteurs préfèrent promotionner d'autres labels que celui de Cordaid.
Il lui semble difficile d’envisager – comme c’est souvent le cas dans d'autres pays, telle la Suède - une gestion en interne des équipes de recruteurs, car cette formule nécessite de bloquer un important budget de préfinancement.
Hanneke Warring suggère que les associations du secteur s’entendent pour fixer de commun accord un quota annuel maximum de donateurs qu’une agence de street fundraising pourrait recruter. Pareille mesure éloignerait du marché les agences commerciales de moindre qualité qui opèrent dans une optique purement commerciale.
Sources
- WOW (nov. 2021) - 'Duurzame relaties via face to face fondsenwerving : adviesstuk ‘Face to Face Fondsenwerving’ (lien)
- Vakblad Fondsenwerving (n°5, 2021) - Joelle Angement - ‘Een persoonlijk band krijgen met donateurs is een utopie’