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18 janvier 2015 - Comment veiller à ce que le message adressé au donateur l’incite à effectuer un don, sans pour autant utiliser de manière récurrente l’arsenal des arguments ou des visuels culpabilisants ?
Nombre d’ouvrages ou d’articles polémiques ont traité la question de la tension entre éthique et efficacité des mailings de collecte. Intitulé '‘Communication et éthique dans les récoltes de fonds’, le mémoire de Marlène Bragard (Université de Gand) prit pour exemple un mailing de 2007, rédigé par DSC (Direct Social Communication) pour le compte d’Aviation sans Frontières.

'‘Communication et éthique dans les récoltes de fonds’ (mémoire): extraits

Le titre du mailing d'Aviation sans Frontières en dit déjà là long sur le type de courrier :
« URGENCE !!! Sauverez-vous la vie d’Aimé ? »
Par cette phrase, le lecteur est directement impliqué et intégré à l’histoire. On lui demande déjà de ‘sauver’ une personne.
(…) La toute première ligne de la lettre est une sorte de chantage : « Une évacuation inespérée se produira si vous réagissez positivement à mon appel à l’aide ».
Le rédacteur cherche à ce que le lecteur se sente mal, voire coupable s’il n’agit pas sur-le-champ. Ensuite, nous pouvons lire: « Pendant que vous lisez ces mots, Aimé, un enfant congolais de 3 ans, attend avec inquiétude que le Cessna d’Aviation sans Frontières vienne le chercher. Actuellement, il est seul. (…) » 
Je m’interroge. Qu’en est-il de la réalité ? Tout lecteur sensé se rendra bien vite compte que ces mots ne correspondent pas à la réalité. Cet enfant est-il vraiment seul et attend-il réellement qu’un donateur verse 39€ pour que le pilote puisse faire le plein de carburant ?
On constate que ce n’est qu’à la fin du message, dans le post-scriptum, que le lecteur attentif peut se rendre compte du caractère fictif du personnage de la lettre : «Ils sont encore nombreux les enfants cachés dans la brousse, représentés symboliquement par le petit Aimé dans ma lettre (…). »
Pas besoin dès lors d’une analyse très approfondie pour constater que ce texte fort simple, très long, répétitif, pas très professionnel, joue uniquement sur les sentiments de culpabilité du lecteur. (p.58)

Pour Marlène Bragard « les donateurs sont las non seulement de la fréquence des sollicitations, mais également des méthodes de sensibilisation auxquels ils sont sujets : des images ou textes ‘chocs’, des appels à l’aide ‘misérabilistes’ utilisés sans aucune parcimonie par bon nombre d’associations. » (p.39)

Elle souscrit volontiers (p.52) le point de vue d’Alex Gosseries, auteur de « Sur l’éthique dans la récolte de fonds », lequel incrimine surtout l’usage abusif d’images misérabilistes :
« Ainsi, choquer dans un nombre limité de cas peut être éthiquement acceptable voire requis. Par contre, la banalisation des messages choquants rendrait ceux-ci inefficaces voire contre-productifs ».

Extraits de :
‘Communication et éthique dans les récoltes de fonds’ (mémoire, 80 pages), Marlène Bragard, Université de Gand (2009), - document téléchargeable

-> Autres articles consacrés aux pratiques commerciales de l'agence Direct Social Communications (lien
-> Autres articles consacrés à la thématique 'Ethique et transparence' (lien)

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