Encourager la générosité des donateurs, sans surcoût inefficace à charge de l’Etat
Serait-ce le moment d'évaluer, en Belgique comme aux Pays-Bas, l’efficacité des mécanismes d’incitation aux dons ?
En Belgique chacune des quelque 2.500 organisations habilitées à octroyer une attestation fiscale se trouve désormais tenue de collecter le numéro national de l’ensemble de ses donateurs. Cette obligation semble inspirée par l’administration du SPF Finances, soucieuse de faciliter ainsi une connexion automatique entre les montants versés par les donateurs et leurs déclarations fiscales.
Une décision particulièrement lourde de conséquences en termes de surcharge de travail pour les organisations concernées !
-> Lire : 'Ajout obligatoire du numéro d'identification au Registre National dans les fiches fiscales' (lien)
On s’étonnera donc que la décision du gouvernement belge n’ait été précédée d’aucune consultation avec les représentants du secteur associatif, ni d’aucune réflexion quant aux avantages de certains mécanismes d’incitation à la générosité qui ont déjà démontré leur efficacité ailleurs en Europe.
Subsidier les associations en fonction des dons collectés :
l’efficacité de la formule britannique séduira-t-elle le gouvernement néerlandais ?
Les autorités néerlandaises semblent avoir adopté une démarche plus méthodique, en décidant de faire évaluer l’efficacité de leur mécanisme d’incitation aux dons, dont le mode de fonctionnement actuel ("giftenaftrek") semble pour partie comparable au système belge ("heffingskorting").
A cet effet elles ont commandité en 2022 une recherche auprès du bureau d’étude SEO, dont le rapport final (115 pages) est disponible en ligne.
On n’oserait affirmer d’emblée que les recommandations de cette recherche mériteraient d’être transposées telles quelles au niveau de la Belgique. Il serait toutefois dommage qu’en Belgique tant les autorités – et notamment le SPF Finances- que les organisations concernées s’abstiennent de tirer parti de cet impressionnant travail de recherche dont nous listons ci-dessous quelques constats et recommandations.
Geven en nemen : constats et recommandations
Le principal constat avancé par les chercheurs de SEO met en question l’efficience (« doelmatigheid ») de l’incitant fiscal néerlandais («giftenaftrek ») : ce dispositif représenterait un coût disproportionné pour l’Etat néerlandais en comparaison avec son impact en termes d’augmentation de la générosité publique.
Leur enquête conclut bien évidemment que le dispositif néerlandais produit des effets positifs (« is doeltreffend »), principalement dans le segment des grands donateurs (particuliers et entreprises). Les chercheurs constatent cependant que le volume des dons générés est significativement inférieur au manque à gagner que ces incitants fiscaux représentent pour l’Etat.
Une part significative de coût du dispositif néerlandais profiterait donc davantage aux donateurs qu’aux associations bénéficiaires.
Ce constat semble corroboré par les résultats d’un sondage mené par SEO sur un échantillon d'environ deux mille donateurs. Les réponses font notamment apparaître qu’un donateur néerlandais sur deux ne serait pas tenté de diminuer son niveau de générosité si les avantages fiscaux liés au statut ANBI étaient supprimés :
Mesurer l'élasticité entre incitants fiscaux et impact en termes de dons
La recherche ‘Geven en Nemen’ tente, au départ de plusieurs scénarios, de mesurer le degré d’élasticité entre différents mécanismes destinés à favoriser la générosité publique et leur impact effectif en termes d’augmentation des dons.
Les chercheurs avancent par exemple (Beleidsoptie 1. Aftrektarief verlagen naar 20 procent, p.102) que si l’avantage fiscal actuel (37%) était réduit au niveau de 20%, le finances de l’Etat bénéficieraient d’une économie de 131 millions € alors que le niveau de générosité n’aurait que très légèrement diminué.
Le dernier chapitre de l’étude avance une série de recommandations, regroupées sous la forme de quatre possibilités de réforme du dispositif actuel.
Un des scénarios envisagés s’inspire du système britannique (Gift Aid) qui privilégie une subsidiation complémentaire des organisations sur base du montant annuel des dons qu’elles ont collecté.
Les chercheurs reconnaissent que la formule Gift Aid présente quelques inconvénients, mais listent divers avantages décisifs en termes de simplication de la procédure, tant pour les donateurs que pour l’administration néerlandaise.
Le rapport SEO propose, au départ de deux exemples (revenus salariaux brut de 1.250 € ou 2.500 €) un intéressant schéma explicatif du Gift Aid:
Récapitulatif des mécanismes d'incitation à la générosité proposés dans différents pays
Le rapport final de l'étude ‘Geven en Nemen’ comprend également nombre de données relatives à l'évolution de la générosité aux Pays-Bas, ainsi qu'un intéressant récapitulatif des mécanismes d'incitation à la générosité proposés dans différents pays européens (voir ci-dessous).
Le secteur caritatif néerlandais ne manquera certainement de prendre position par rapport aux recommandations contenues dans le rapport SEO. La fédération nationale Goede Doelen Nederland n'avait pas communiqué de réaction dans les tous premiers jours suivant la publication du rapport.
Sources
- SEO / Economisch Onderzoek (maart 2024) – ‘Geven en nemen – Evaluatie Giftenaftrek 2016-2021’ (in opdracht van Ministerie van Financiën) (lien)
- Vakblad Fondsenwerving (26/04/2023) – ‘Geefsubsidie alternatief voor niet doelmatige giftenaftrek’ (lien)
- De Dikke Blauwe (03-04/2023)
- ‘Wie werden geïnterviewd voor het rapport over giftenaftrek?’ (lien)
- ‘Giftenaftrek doeltreffend, niet doelmatig. Een geefsubsidie kan een beleidsoptie zijn’ (lien)
- 'Uitstel van executie na evaluatie giftenaftrek' (lien)
- Goede Doelen Nederland (04-2024) - De evaluatie van de giftenaftrek afgerond (lien)
- Rien Van Gendt - Alle Hens aan Dek: Giftenaftrek versus Geefsubsidie (lien)
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