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 T Accord gouvernemental06-02-2025 - Selon l'Administration, citée dans Le Soir du 07/02/2025, cette diminution du pourcentage de réduction d’impôts accordée aux donateurs permettra au budget fédéral de réaliser une économie de quarante millions, hors impact sur les additionnels communaux. L'Administration précise que si le montant global des dons diminue, le gain sera plus important .
Cette décision n'a, dans un premier temps, guère suscité de forte réaction dans les médias. Alors même que La Libre Belgique (édition du 06/02/2025) souligne que, d'après Aurore Tourneur (cheffe de groupe des Engagés à la Chambre), certains partis de la coalition Arizona voulaient supprimer totalement la déduction fiscale pour les dons aux ONG !


A l'évidence les organisations caritatives directement concernées jugeront totalement inopportun que la générosité des Belges soit ainsi découragée en ces temps difficiles, alors que leurs dons viennent principalement en aide à des populations en situation de vulnérabilité que l'Etat sur-endetté n'est plus en mesure de soutenir.

Nul doute que cette mesure fiscale annoncée par le gouvernement Arizona aura un impact négatif sur l’évolution des dons.
Mais faut-il pour autant s’attendre à une diminution globale de la générosité des Belges sur l’année 2025 ?

Vigoureuses protestations du secteur associatif

FISC B 2025 LeSoirUn copieux reportage du Soir (07/02/2025) publié sous le titre 'Moins d’incitations fiscales, moins de dons : la société civile en émoi', s'est fait l'écho des nombreuses réactions indignées exprimées par diverses organisations dont les ressources dépendent pour partie de la générosité de leurs sympathisants.
Ainsi pour Arnaud Zacharie, secrétaire général du CNCD 11.11.11 "D’un côté, on réduit les subsides des ONG en les incitant à solliciter davantage de dons, mais de l’autre on affaiblit leurs capacités à solliciter des dons ! Quelle est la cohérence."

Donor Info

La Fondation Donorinfo évoque un double risque de diminution du don moyen et de désaffection de certains donateurs.
D'autant que cette mesure constitue un inquiétant signal de moindre soutien du gouvernement au secteur caritatif.
Il est toutefois probable que certains donateurs, motivés par un souci d’altruisme et par le désir d’aider dans la continuité, ne réduiront pas leur niveau de générosité.
Donorinfo rappelle que, selon le SPF Finances, en 2023 plus d'un million de Belges ont déclaré avoir soutenu au minimum une organisation agréée à hauteur de 40 euros, et que le montant moyen déclaré était de 350 €.
-> Lire Donorinfo‘Les mesures fiscales de l'accord gouvernement prévoient que la réduction d'impôts pour dons passera à 30%’ (lien)

La réduction d’impôt serait-elle peu efficace en comparaison avec son coût ?

On aurait toutefois tort de passer sous silence l'opinion de divers experts pour qui le mécanisme d'incitation au don sur base d'une réduction d’impôt s'avèrerait souvent peu efficient, car démesurément coûteux pour l’Etat en comparaison avec la faible augmentation des dons qu'il génère.
Ce constat, que d'aucuns contestent, ressort par exemple d'une analyse par l'économiste Philippe Defeyt de l'impact de la réduction d'impôt fixée provisoirement en 2020 (année Covid) à 60% plutôt que 45%. 
Même constat au terme d'une importante enquête par sondage menée en 2024 aux Pays-Bas à la demande du précédent gouvernement néerlandais.

1. Difficile évaluation de l'impact de l'avantage fiscal exceptionnel accordé en 2020
(crise Covid)

Données SPF Finances
Les données du SPF Finances dont la Fondation Donor Info a proposé une intéressante synthèse (voir Tableau ci-dessous) donnent l'impression que la réduction d'impôt qui a été portée à 60% durant la première année Covid (année 2020) a largement contribué, aux côtés d'autres facteurs liés au contexte Covid,  à la forte augmentation des dons enregistrée cette année-là, avant de se stabiliser durant les années suivantes.

STAT DI 2023

 

On peut être tenté de conclure que le coup de pouce fiscal ponctuel de 2020 a eu un impact durable sur la générosité des Belges. Mais alors comment expliquer qu'ensuite, après l'annulation de cette réduction fiscale à hauteur de 60%, la générosité des Belges se soit maintenue, voire légèrement accrue ?

Année 2020 : selon Philippe Defeyt la hausse provisoire de l’avantage fiscal sur les dons aurait manqué son but

FISC B Defeyt L EchoIl serait étonnant que Philippe Defeyt, économiste réputé autant que proche sympathisant du secteur associatif, approuve le projet de diminution à hauteur de 30% de la réduction d'impôt décidé par le gouvernement Arizona. 
Son jugement s'est par contre avéré assez sévère concernant l'efficacité de la décision gouvernementale prise en 2020 - du fait de la crise Covid - qui visait à encourager la générosité des donateurs en fixant provisoirement la réduction d’impôt à 60% plutôt que 45%.

S'exprimant à ce sujet dans un article de l'Echo (16/10/2021) publié sous le titre ‘La hausse de l’avantage fiscal sur les dons a manqué son but’, Philippe Defeyt estimait que le gouvernement belge a pratiqué à cette occasion de l’overshooting, c’est-à-dire du surdosage : le coût de cette disposition aurait été disproportionné en regard de l’augmentation de la générosité des particuliers durant cette année.

Plutôt que d’activer une disposition qui aurait coûté, selon ses estimations, environ 90 millions d’euros en diminution des recettes fiscales pour l'Etat, le gouvernement de l’époque eut été mieux inspiré en investissant le même montant dans des mesures plus directes de soutien aux organisations actives en levée de fonds.

D'aucuns contestent cependant la validité de l'analyse de Philippe Defeyt, notamment parce que son estimation des coûts ne tiendrait pas compte des nombreux donateurs qui ne peuvent bénéficier de cet avantage fiscal.

2. Pays-Bas : ‘Geven en Nemen – Evaluatie Giftenaftrek 2016-2021’

Le précédent gouvernement néerlandais avait chargé le bureau d’études SEO d'évaluer l'efficience du système d'incitation aux dons en vigueur outre-Moerdijk. La formule néerlandaise présente de fortes similarités avec les dispositions fiscales qui ont cours en Belgique.
Parmi les divers constats de l'étude 'Evaluatie Giftenaftrek 2016-2021’, et surtout de l'enquête par sondage organisée dans le cadre de cette recherche, il est apparu que dans l'hypothèse d'une diminution de la réduction d'impôt - désormais fixée à 20% - cette mesure  n'entrainerait qu'un faible tassement des dons en contre-partie d'une plus-value de 131 millions d'euros en faveur de l'Etat néerlandais.
Les auteurs proposaient que soit dès lors envisagée l'adoption d'un autre mécanisme d'encouragement de la générosité - tel le dispositif en usage au Royaume-Uni - qui s'avèrerait plus efficace. 

Cette recherche ne manqua pas d'influencer les débats au niveau du Parlement néerlandais : 'Er is een evaluatie van de giftenaftrek geweest. Die evaluatie heeft laten zien dat het niet zo'n effectieve belastingmaatregel is. Oftewel: de giftenaftrek an sich leidt niet tot heel veel extra giften. Er wordt daarom een stuk bezuinigd op de giftenaftrek.' (Tweede Kamer, 22/05/2024, Pieter Omtzigt - NSC)

FISC NL Giftenaftrek teruggedraaidLes conclusions de cette recherche ont toutefois été contestées par un groupe d'experts réuni à l'initiative de Goede Doelen Nederland (confer infra : 'Adviesrapport behoud giftenaftrek') et par une analyse critique du Professeur René Bekkers (confer infra : 'Wat kunnen we leren uit de recente evaluatie van de giftenaftrek ?').
Le gouvernement suivant, qui se mit en place dans le courant de l'année 2024, n'a d'ailleurs pas repris à son compte la plupart des recommandations de l'étude 'Evaluatie Giftenaftrek’  (lien)

2. Analyse de la mesure proposée par la coalition Arizona :
le point de vue du professeur François Moniquet (UC Louvain)

Le constat exprimé par Philippe Defeyt en 2021 rejoint pour partie l'analyse récente de François Moniquet, professeur de Sciences Economiques à l'UC Louvain. ce dernier est cité dans le reportage du Soir (07/02/2025) publié sous le titre 'Moins d’incitations fiscales, moins de dons : la société civile en émoi'.
Il est d'avis que le gouvernement Arizona considère probablement ce type de déductibilité comme une "dépense fiscale" à charge de l'Etat, lequel estime que ces dépenses coûtent fort cher sans qu'on ait la preuve qu'elles produisent les effets escomptés.
François Moniquet n'estime pas pour autant qu'il soit justifié de réduire le montant de cette réduction d'impôt si cela nuit manifestement au secteur associatif qui vit de dons. 
Il suggère plutôt que l'Etat envisage l'adoption d'un dispositif alternatif plus efficace, par exemple en encourageant la générosité des Belges au travers d'une subsidiation qui serait directement versée aux organisations.

Conclusion

A l'évidence les priorités de l’actuelle coalition Arizona s’inscrivent avant tout dans une politique de réduction à coût de rabot de l'endettement structurel de l'Etat.
Il n'est dès lors nullement prévu que les 30 à 50 millions d’euros que l'Etat fédéral économisera chaque année grâce à la réduction de cet avantage fiscal serviront à financer un mécanisme alternatif plus performant d’incitation à la générosité.

Si le degré d'efficacité du système belge basé sur un incitant fiscal mérite d'être questionné, et notamment comparé par rapport à d'éventuels dispositifs plus efficaces adoptés dans d'autres pays, rien ne justifie que l'incitant actuel soit brutalement affaibli sans nulle adoption de mesures alternatives d'encouragement de la générosité publique. 

On comprend dès lors que nombre d’organisations concernées se prononcent contre toute réduction de l'actuel l’incitant fiscal. 
CoalitionImpact LogoPlusieurs démarches ont dès lors été entreprises par la CoalitionImpact, qui regroupe plusieurs coupoles et fédérations œuvrant pour l'intérêt général :

-> CoalitionImpact : 'Diminution de la réduction d’impôt pour les dons (update du jeudi 12 février)' (lien)

Sources
- Article Fundraisers Forum - 'Pays-Bas : Rapport ‘Geven en Nemen – Evaluatie Giftenaftrek 2016-2021’ (lien)
- Le Soir - Philippe Galloy (16/10/2021) - ‘La hausse de l’avantage fiscal sur les dons a manqué son but
- SEO / Economisch Onderzoek - Rapport ‘Geven en Nemen – Evaluatie Giftenaftrek 2016-2021’, mars 2024 (lien)
- Tweede Kamer (Pleinair Verslag 22/05/2024), Pieter Omtzigt - NSC (lien)
- Goede Doelen Nederland (02/07/2024) - Adviesrapport behoud giftenaftrek: reactie op aangekondigde bezuiniging op de giftenaftrek en op het SEO onderzoek ‘Geven en nemen’ (lien)
- René Bekkers (09/06/2024) - 'Wat kunnen we leren uit de recente evaluatie van de giftenaftrek ? (lien)
- Goede Doelen Nederland (17-09-24) - 'Aangekondigde bezuiniging op de giftenaftrek voor een belangrijk deel teruggedraaid' (lien)
- DonorInfo - 'Les mesures fiscales de l'accord gouvernement prévoient que la réduction d'impôts pour dons passera à 30%’ (lien)
- Coalition Impact - 'Diminition de la réduction d'imôt pour des dons : la douche froide' (lien)
- Le Soir (07/02/2025) -  'Moins d’incitations fiscales, moins de dons : la société civile en émoi'.
- OCDE - Etudes de Politique fiscale - Etude n°27 'La Fiscalité et la Philanthropie' (156 p.) (document téléchargeable)

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