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Un couple solidaire et engagé, qui préfère désormais ne plus donner

23 novembre 2016 - La commune de Zolder compte nombre de citoyens engagés, au nombre desquels Theo Rayen et son épouse, qui soutiennent une initiative locale - l’asbl Schilderswijk - ainsi qu’un micro-projet de coopération au développement.
Sur proposition de son épouse, le couple décide de verser un premier don au profit d'une importante association néerlandophone active dans le domaine des maladies, qui collecte un peu plus d'1,5 million d'euros par an, presqu'exclusivement au travers de mailings (650.000 € en frais de mailings, hors appointements). 

Et voici qu’à leur grand étonnement, à l'évidence suite à ce premier don, leur boite aux lettres se trouve bientôt envahie d’un nombre croissant d’appels aux dons émanant de diverses autres associations.
Theo Rayen et son épouse s’étonnent en outre de constater que plusieurs de ces messages sont accompagnés de divers gadgets offerts au titre de cadeaux. Ils se demandent dès lors si ces associations se préoccupent réellement d’affecter au maximum les contributions de leurs donateurs aux projets de terrain, plutôt qu’à des dépenses excessives en collecte de fonds.
Theo est d'ailleurs d’avis que l’association à laquelle le couple a confié un premier don "se tire une balle dans le pied" en acceptant que les adresses de ses nouveaux donateurs soient aussitôt exploitées par d’autres associations.

Il sera mis fin à l’envoi des nombreux appels au don après que Monsieur Rayen ait pris contact avec les différentes associations concernées, et surtout avec l’agence commerciale DSC (Direct Social Communication) à laquelle ces différentes associations ont sous-traité tout ou partie de leur collecte de fonds. 

Précisons ici que d’étranges dispositions contractuelles, que la société DSC parvient à imposer à la quasi-totalité des associations qui font appel à ses services, lui permettent d’exploiter de manière répétée les adresses de ces nouveaux donateurs que ces associations ont pourtant prospectés à leurs frais.

Commentaire sévère d’Alexander De Croo, Ministre de la Coopération

Theo Rayen a profité d’une tribune que l’hebdomadaire Knack (n°47, 23-29 novembre 2016) consacre au thème de la solidarité internationale pour interpeller Alexander De Croo, Ministre de la Coopération au Développement.
Résumant les péripéties décrites ci-dessus, il s’interroge : « Nos données personnelles peuvent-elles ainsi être vendues ou transmises à des tiers ? »
La réponse du Ministre se veut nette et dépourvue d’ambiguïté : « Je désapprouve bien entendu cette pratique, qui est condamnable autant que contre-productive. Si quelqu’un soutient une association, cette personne doit savoir à quoi s’en tenir. Pour que des données puissent être transmises à des tiers, il faut que l’association en ait reçu l'autorisation de manière explicite, et non sous forme d’un consentement stipulé quelque-part dans les ‘conditions générales’.
Je verrai avec Philippe De Backer, secrétaire d’Etat compétent pour les questions relatives à la protection de la vie privée, comment solutionner ce problème. "

Pressions abusives en matière de mailings: l'expérience britannique

L’interpellation du couple Rayen amène ainsi le Ministre De Croo à soulever l’opportunité, pour les associations opérant en Belgique, d’une règlementation plus stricte concernant l’utilisation des données personnelles des donateurs.
L'utilisation abusive de listings de donateurs actifs a également souvent été dénoncée au Royaume Uni, où ces pratiques ont alimenté nombre d'articles critiques dans divers médias.
-> Lire 'Royaume-Uni: contestation des techniques de collecte trop intrusives'

Les autorités britanniques ont dès lors envisagé d'imposer diverses mesures particulièrement restrictives concernant les opérations de collecte de fonds au travers de mailing ou de campagnes d'appels téléphoniques.

Les associations britanniques ont cru un moment - avant le vote du Brexit ... - que la nouvelle directive de l'Union Européenne en matière de protection de la vie privée imposerait de fortes contraintes, dans le cadre d'une généralisation du principe de l'"opt-in" (lire).
La directive européenne se contente en réalité d'indiquer que les opérations de télé-contact et de mailings devront respecter l’option « opt-out » - que tout citoyen de l'UE sera à tout moment en droit d'activer. Il n'est pas prévu d'exiger le consentement préalable du consommateur - le cas échéant 'doinateur' - sous forme d’ « opt-in ».

Royaume-Uni:
l'option "opt-in" privilégiée par la RNLI pourrait lui faire perdre 42,8 millions d'euros

Certaines associations choisissent de se fixer des règles particulièrement exigentes, qui visent à réduire au maximum tout risque d'irritation de donateurs susceptibles d'être lassés par un envoi excessif de messages.
C'est ainsi que la forte médiatisation de certains abus a amené la RNLI - la Lifeboat Association compte parmi les principaux acteurs de la collecte au Royaume-Uni - à instaurer systématiquement une procédure de type « opt-in » destinée à réguler la communication auprès de ses propres donateurs.
Cette mesure particulièrement stricte exclut non seulement toute cession d'adresse de donateurs au profit d'organisations tierces, mais régule également - dans le respect du choix formulé par chaque donateur - la fréquence des messages que l'association lui enverra.

Plusieurs médias britanniques, au nombres desquels The Guardian (lien), ont salué le choix jugé courageux de cette association.
Car en privilégiant le plein respect des préférences de ses sympathisants, l'équipe dirigeante de la RNLI est consciente de ce que cette mesure extrème provoquera probablement une diminution des contributions de ses donateurs à hauteur d'un total de £ 35,6 millions (soit 42,8 millions d’euros) répartis sur les cinq prochaines années.

Pour plus d’infos:

  • Hebdomadaire KNACK, n°47 (23-29/11/2016), p.27
  • Fundraising Week: 'Opt-in-only systems will not be compulsory' (lien)
  • The Guardian: 'Treating our charity's supporters well will cost us £35m, but they are worth it' (lien)

-> Autres articles concernant cette thématique, répertoriés sous
    'Direct Social Communications: des techniques de fundraising souvent critiquées'

 

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