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Peu de sources statistiques permettent de comparer le degré de mobilisation des francophones et des néerlandophones en matière de générosité publique: dons, legs ou participation à des événements de collecte.
Quelques tendances significatives peuvent toutefois être dégagées au départ de données financières émanant des organisations actives en levée de fonds, et des statistiques du SPF Finances.

Des données statistiques difficiles à interpréter

Organisations nationales de collecte de fonds
Bien qu’élaboré au départ d’un échantillon incomplet, le Baromètre de la Générosité publique (Fundraisers Forum) identifie 34 organisations nationales, présentes sur l'ensemble du territoire national, qui ont collecté 239 millions d’euros en 2017 (147 m. € en dons et 92 m. € en legs).
Une part non-négligeable de la générosité des Belges est donc collectée par des organisations nationales et bilingues.
Celles-ci ne publient guère de statistiques concernant la répartition linguistique de leurs donateurs. Mais on sait que la plupart d'entre elles comptent davantage de donateurs néerlandophones du fait des différentes facteurs, notamment démographiques et économiques, dont question plus loin.

Organisations similaires disposant de structures indépendantes par communauté linguistique
La Belgique compte également un petit nombre d'organisations qui poursuivent des finalités rigoureusement similaires mais travaillent au départ d’entités juridiques indépendantes par région linguistique.

On note dans cette catégorie d'associations que les résultats des partenaires néerlandophones sont nettement plus élevés (comptes 2017): 

Autres organisations actives dans une seule communauté linguistique
La plupart des organisations actives en levée de fonds sont de taille modeste et mobilisent leurs donateurs dans un seul groupe linguistique.
Citons, parmi le TOP 5 des associations de cette catégorie:

  • du côté francophone : FNRS-Télévie, Fondation Louvain, Cap 48 et Viva for Life, Fondation St. Luc, Sans Collier;
  • du côté néerlandophone : Kom op tegen Kanker, Music for Life, KU Leuven Universiteitsfonds, Broederlijk Delen.

En élargissant cet échantillon aux quelque 30 organisations qui ont collecté minimum 1 million d’euros en 2017 (dons et legs) au sein d'une seule communauté linguistique, on constate que

  • du côté francophone, 12 associations ont collecté 114 millions d’euros, soit 40% du total
  • du côté néerlandophone, 18 structures ont collecté 169 millions d’euros, soit 60% du total.

Ces chiffres donnent à penser que, concernant les plus grandes organisations actives dans une seule région linguistique du pays, la différence en termes de montants collectés correspond aux chiffres de la population (42% FR, 58% NL).

Générosité publique: quelles différences régionales ?

Les statistiques officielles livrent des données ventilées sur base des trois régions, ce qui complique les tentatives d'analyse de la générosité des Belges selon leur rôle linguistique. 
Rappelons que la Flandre, la Wallonie et Bruxelles comptent respectivement 58%, 32% et 10% de la population du pays.

Facteurs démographiques, socio-économiques, historiques et culturels
Le niveau de générosité des habitants et des entreprises d'une région varie principalement, en Belgique comme ailleurs, en fonction du degré de développement économique et du pouvoir d’achat des habitants.
Le revenu moyen des ménages varie fort entre le Nord et le Sud du pays, et explique pour partie le pourcentage plus élevé de donateurs néerlandophones.

D'autres facteurs, notamment d’ordre historique ou culturel, favorisent également les opérations de collecte dans le Nord du pays:

  • Malgré la sécularisation en cours on constate un ancrage solide, surtout dans le Nord du pays, de plusieurs grandes organisations de solidarité d’inspiration chrétienne.
    Une douzaine d'associations proches de cette sensibilité ont collecté 44 millions d’euros (dons et legs, total national) en 2017, dont probablement une forte majorité de contributions versées par des donateurs néerlandophones.
  • L'ancienne tradition de mobilisation locale de bénévoles au départ des paroisses et de congrégations missionnaires s'est pour partie maintenue et réorientée dans le cadre de nouvelles initiatives locales et solidaires particulièrement nombreuses ('Vierde Pijler', etc.). On en redécouvre l'importance par exemple au travers de la campagne annuelle 'De Warmste Week'.

Sensibilité régionale par rapport à certains thèmes d’actualité
Les organisations nationales actives en collecte de fonds n'ont jamais estimé que d'éventuelles différences culturelles entre francophones et néerlandophones justifieraient de modifier le contenu des messages envoyés aux donateurs de chaque rôle linguistique.

Des témoignages recueillis à l’occasion d’un récent workshop organisé par la Fundraisers Alliance Belgium indiquent cependant que certaines campagnes locales de collecte de rue (street fundraising) laissent parfois apparaître une sensibilité différente entre francophones et néerlandophones. 
Ainsi le thème de la dénucléarisation mobilise-t-il davantage les néerlandophones, tandis que les francophones - davantage concernés par les activités de la FN Herstal -  se sentent plus directement interpellés par la thématique du commerce des armes.

Jeroen Janssens, directeur de l'agence Direct Result, constate par ailleurs au départ des résultats de sdon agence que les campagnes de recrutement de donateurs sur la voie publique produisent des résultats très similaires au Nord et au Sud du pays:

  • taux de recrutement par jour et par recruteur: 2,48 en Flandre, 2,41 en Wallonie,
  • taux d'annulation lors du Welcome call: 8,22% en Flandre, 7,85% en Wallonie,
  • don moyen par domiciliation: € 12,53 par mois en Flandre, € 12,31 par mois en Wallonie.

Des méthodes et supports de collecte plus performants dans le Nord ?
Le Nord du pays dispose d'autres atouts qui contribuent à renforcer la réussite de certaines opérations de collecte:

  • alors que nombre de francophones sont branchés sur des chaines françaises, la forte audience des médias radio-télévisés du Nord du pays a contribué à renforcer l'impact de certaines opérations de solidarité radio-télévisées, tel que les appels d'urgence du Consortium 12-12.
  • certains événements sportifs solidaires bénéficient peut-être d'une mobilisation plus aisée des néerlandophones, grâce aux nombreux adeptes du vélo et au portefeuille d'événements sportifs principalement organisés en Flandre à l'initiative de la société Golazo.

On notera enfin qu'une large majorité d'agences commerciales de fundraising (direct mail, télémarketing, street fundraising) se sont d'abord établis en Flandre et disposent d'une direction principalement néerlandophone.
Le direct mail massif, ainsi que le télémarketing et le street fundraising se sont dès lors probablement développés un peu plus rapidement dans le Nord du pays.

Y aurait-il également lieu de mettre en cause la culture managériale des associations francophones, qui serait moins professionnelle que dans le Nord du pays ?
Les résultats d'un sondage fragmentaire, réalisé à l'initiative de la Fundraisers Alliance Belgium auprès de quelques fundraisers très majoritairement néerlandophones, semblait vouloir donner quelque crédit à cette hypothèse.
Comme aucune recherche sérieuse n'a jamais étayé cette allégation, on est tenté d'y voir une malencontreuse relance de préjugés et stéréotypes quelque peu éculés.

En guise de conclusion

Plusieurs indicateurs laissent entrevoir une plus grande générosité du don moyen des donateurs néerlandophones, donc même après prise en compte du différentiel entre populations francophone (42%) et néerlandophone (58%).
Précisons que les statistiques du SPF Finances indiquent qu'à l'inverse la générosité des francophones pourrait être, du moins jusqu'il y a peu, proportionnellement supérieure en matière de legs.

Ces différences régionales n'ont rien d'exceptionnel: d'autres recherches confirment, notamment  au niveau de différents pays européens, que la générosité des particuliers et des entreprises est toujours partiellement conditionnée par le niveau de développement économique et le revenu moyen des habitants des régions concernées.
Le différentiel au niveau des dons collectés au départ de donateurs francophones et néerlandophones parait même plutôt faible, dès lors que le potentiel de collecte de la Flandre bénéficie de plusieurs facteurs favorables, notamment économiques que démographiques, cités ci-dessus.

Sources

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